
Abbé Henri-Raymond Casgrain, Les légendes canadiennes.
Abbé Henri-Raymond Casgrain, Les légendes canadiennes.
Joseph-Arthur Lavoie dit à Rose-Anna Saint-Cyr, dans Le temps d'une paix, de Pierre Gauvreau:
Un avion passe,
Au-dessus de la ville,
Créature des profondeurs
À l’envers de la mer sidérale.
Entre nos doigts d’étrangers,
Nous déployons cartes et boussoles
Qui mènent ailleurs, trop vite,
Dans des villes grises
En grappe dense à saisir.
Voyageurs attardés
Sur les cités conquises,
Nous refaisons le silence
Dans la nuit américaine,
Cheveux au vent,
Gestes naufragés,
Avant que l’amour quotidien
En fine neige bleue,
Ne vienne délier nos sens
Si sensibles aux fantasmes.
Pierre Rousseau, Sur le dos de la nuit, 2005.
Il y a les yeux qui louchent, l’œil qui «exprime un point de vue convergent» et «qui dit merde à l’autre».
Frederic Pagès. Au vrai chic anatomique.
«Est-il chose plus méchante que l’œil ?» (Sir 31,15)
Boris Leonidovich Pasternak, Le docteur Jivago.
Il nous faudrait saisir le poignet de la mort,
Cette mal-aimée,
Pour la retenir,
Comme le câble le navire
.....échoué,
Pour rien, pour voir,
Espérer un trésor dans les décombres
.....de tant de malentendus.
Il nous faudrait saisir son poignet d’une main,
Et de l’autre,
caresser sa joue,
.....Une fois,
.....Deux fois
.....Trois fois...
Nous ne sommes pas à la hauteur
Quand l’engoulevent,
.....Ivre de conquêtes,
.....La gueule grande ouverte,
Avale l’espace et l’air du temps
Entre les saules pleureurs penchés
.....sur l’eau miroitante
Où patinent, légères, les frivoles nèpes carnivores.
Pierre Rousseau, Sur le dos de la nuit, 2005.
Honoré de Balzac, La comédie humaine.
«L’anus, c’est avant tout l’expulsion obligatoire — sous peine de mort — des matières fécales. La constipation, à laquelle les femmes enceintes semblent particulièrement prédisposée, amène, selon certains auteurs, des troubles beaucoup plus graves. Ainsi, selon le Dr. J. H. Curtis, «la constipation et tout ce qui oblige à faire des efforts pour aller à la selle est très préjudiciable à la vue», c’est-à-dire augmentation de la pression intracrânienne, prédisposition aux hémorragies oculaires et cérébrales, etc.»
Pierre Rousseau, Les orifices du corps dans les arts et la littérature, 1996.
Dans la ville nue,
Les lampadaires s’éteignent,
Fermeture oeils sur le rebord des trottoirs échiffés
Comme les membres ruisselant de semence de perles.
Nous nous blasons du banal quotidien,
Nous nous délestons de courage et de cœur.
Nous ne voyons plus que l’envers des cuisses fermes,
Sous les images coquilles au premier plan débusquées
Dans nos indociles mémoires.
Dans l’antre frison de l’autre,
Ouverture feuille séchée de braise,
Nous nous délions à nouveau du renouveau.
Puis nous éteignons la lampe de chevet,
Comme on ferme un oeil.
Et nous nous refermons...
Pour mieux nous ouvrir en corps et conscience
Sous les coeurs débraillés.
Pierre Rousseau, Sur le dos de la nuit, 2005.
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Dans un wagon de métro de la ligne orange, la jeune fille lit Les Yeux jaunes des crocodiles debout près d’un aveugle.
«J’aime la logique urbaine qui tient compte de l’ouverture d’esprit, des animaux, des arbres, des couleurs. De l’espérance aussi. J’aime quand, dans les rues étroites de Montréal, les grandes bourrasques soulèvent les jupes et ébouriffent les cheveux des jeunes filles. Épanouie, ma ville sera sans pudeur aucune, comme les prunelles d’un voyeur. Un jour, j’ouvrirai moi aussi mes yeux sur l’éblouissement du monde. Peut-être deviendrai-je aveugle, avec des yeux ouverts par en dedans, comme les étoiles les nuits de pleine lune.»
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