dimanche 28 décembre 2008

Regard sur l’enfance - Bête puante

Dire à l’autre qu’il pue est l’insulte suprême. Les enfants le savent, eux, comme dans Septième ciel, de Caryl Churchill, où la petite Cathy, à qui on ne veut pas donner le collier de perles, dit à sa mère : «Je veux mes perles, t’es affreuse, je te déteste, maman, tu pues.»


Pierre Rousseau, Les orifices du corps dans les arts et la littérature, 1996.

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samedi 27 décembre 2008

La musique - S'émouvoir

Voici un courtextrait de la Tosca (Act II «Vissi d'arte»), de Puccini, chanté par Kiri Te Kanawa dont la voix m'émeut particulièrement ici, jusqu'au frisson.


.....Diedi gioielli della Madonna al manto,
.....e diedi il canto agli astri, al ciel,
.....che ne ridean più belli.
.....Nell’ora del dolor
.....perchè, perchè, Signor,
.....ah, perchè me ne rimuneri così?

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vendredi 26 décembre 2008

Les yeux de Montréal - 11

Rue Le Royer, Montréal

Photo: Pierre Rousseau
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jeudi 25 décembre 2008

D’yeux - Privations sensorielles


Fallait-il aller jusqu’à l’ascétisme, comme Saint-Antoine :


«Celui qui demeure au désert et y vit dans le recueillement est débarrassé de trois combats: de l’ouïe, du bavardage et de la vue. Son seul combat est la fornication.»


Aline Rousselle, Porneia: de la maîtrise du corps à la privation sensorielle: IIe-IVe siècles de l'ère chrétienne.

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mardi 23 décembre 2008

Clin d’œil - L’arracheur de dents

L’arracheur de dents dit à la jeune fille qui a mal aux dents :

«— Montez là-haut dedans ma chambre, je vais vous mettre de l’onguent.» et bien sûr «Ell’ fut pas aussitôt en chambre qu’ell’ sentit soulagement.»

Angélina Paradis-Fraser, C'était la plus jolie des filles: répertoire des chansons d'Angélina Paradis-Fraser.

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lundi 22 décembre 2008

La musique - Joli logis

Voici un courtextrait tiré du microsillon haute fidélité (33 1/3 RPM, Trans-Canada Royal, 196?) «Le temps des fêtes chez la famille Demers» dans lequel le chanteur se trompe de mot en chantant «Le bon vin m'endort»: joli pour logis; bien sûr, il se reprend «très bien» la deuxième fois dans cette chanson à répondre. Quelques autres perles existent sur ce disque vinyle.


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dimanche 21 décembre 2008

Vision - Bec et griffes

Lors d'une visite de routine chez l'opticien, ce dernier, tout en me faisant passer une batterie de tests pour mes yeux, parlait constamment, fustigeant la médecine traditionnelle, surtout les médicaments, véritables poisons pour le corps, et me vantait les médecines alternatives, le régime oméga, etc. Je le trouvais un peu « sec », voire agressif. Il insista pour me donner des références bibliographiques et nota quelques titres sur un bout de papier. Son écriture me fit voir d'un autre œil sa prédilection pour les médecines dites douces...

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samedi 20 décembre 2008

Aux yeux de la mort - Silence mortel

Il y a le silence mortel, «ce silence, qui brusquement s’impose aux bavards d’un festin, rappelle celui d’un repas funéraire, du Silicernium ; au milieu des joyeux entretiens, n’évoque-t-il pas la mort qui plane sur les convives, et qu’ils redoutent ?»


Waldemar Deonna, Croyances et superstitions de table dans la Rome antique.

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jeudi 18 décembre 2008

La musique - Stornellatrice

Voici Stornellatrice, de Ottorino Respighi, les deux premiers couplets (versi di Zangarini, 1906). Cette version enregistrée en 1929, alors que la soprano Medea Mei-Figner (1859-1952) avait 70 ans, m'émeut toujours.




Che mi giova cantar: "Fior di betulla:
Vorrei tu fossi il sole ed io la stella,
E andar pel cielo e non pensare a nulla!"
Quando poi l'eco mi risponde: nulla?

Che mi vale cantar: "Fiore dei fiori:
Tu sei l'amore mio díoggi e di ieri:
Tu sei l'amore mio che mai non muori!"
Quando poi l'eco mi risponde: muori?

Enregistrement et photo tirés de: Club «99» CL 99-96
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mercredi 17 décembre 2008

Poésie - Sous la jupe

Il est minuit moins dix.

Sur la rue Saint-Denis,
Une jeune fille,
Tête haute, cheveux au vent,
Va, d’un pas alerte, sautillante,
Débusquer l’horizon
Du prochain coin de rue.

Attachée à son baluchon,
Une petite vache en peluche
Bat les prés
De son dos.

Une main se pose
sur un genou.

Les moustaches d’un chat
Traversant la nuit
Frôlent le mur,
Comme les doigts,
La cuisse,
Sous la jupe.

Les frissons prennent,
Encore une fois,
Odeur de passion.

Pierre Rousseau, Sur le dos de la nuit, 2005.

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mardi 16 décembre 2008

La littérature - Dans mon coin


«Ne me regarde pas de loin avec mépris. Je me blottirai dans mon coin et je resterai assise dans la nuit. De mes deux mains, je couvrirai ma honte.»


Rabindranath Tagore, Le jardinier d'amour.

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lundi 15 décembre 2008

Lacrymatoire - Au carré de l'œil

«— Tu vois, je ne suis même pas capable de pleurer, Judith. Pleurer, c’est un signe de vie, et moi, je ne puis plus pleurer.»

[...]

«Elle sourit et essuie ses yeux. Étrange un visage où se marient larmes et sourires.»

André Giroux, Le gouffre a toujours soif.
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dimanche 14 décembre 2008

Aux yeux de la mort - Branle bas



«Cette beauté souveraine
..A r' allumé mes vieux ans :
..Ses attraits sont si charmans,
..Que pour sortir de la peine
..Où m' a conduit son bel oeil,
..Je n' attens que le cercuëil.»

Vincent Voiture, Sur l’air du branle de mets (extrait).

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samedi 13 décembre 2008

Regard sur l’enfance - Le petit dernier


1970. Un voyage sur le pouce, en Gaspésie. Je rencontre Monsieur Campion dans un petit village côtier. Monsieur Cambion a un petit cochon sauvage tacheté qui courre partout et un cube de photos de ses enfants. Il me montre son petit cochon et la photo la plus importante de sa collection : celle de son petit dernier, un flétan de 90 livres pêché deux mois auparavant.
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vendredi 12 décembre 2008

D’yeux - Le fruit non défendu

Simone, ayant apporté une belle pomme rouge pour sa collation, l’avait mise dans sa besace qui se portait alors sous la jupe:


«Agenouillée juste en avant de Régine au milieu de la classe, Simone ne put s’empêcher de relever sa jupe et montrer le fruit succulent à sa compagne.» (p. 61)

Mais la religieuse croyant à une curiosité malsaine força toute la classe à dire un Ave Maria pour les deux jeunes impudiques. Ces dernière ne purent plaider leur cause, car il était interdit de répliquer...

Yolande Theriault, Le Vieux couvent de Ste-Anne-de-la-Pérade.

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jeudi 11 décembre 2008

Clin d’œil - Chanson corsée


Cette chanson (Il pleut, il pleut, bergère ou L'orage), vieille de plus de 200 ans [Philippe Fabre d'Eglantine (1750-1794)], a résisté au temps, mais, au Québec du moins, elle a connu la censure. En effet, on évitait de chanter le dernier couplet, le jugeant trop «osé» [cf. l'enregistrement fait par Ovila Légaré, Lachine, Disques "Mignon" pour la jeunesse (1930?)].

Voici ce dernier couplet:

..........Eh bien voilà ta couche,
..........Dors-y bien jusqu'au jour,
..........Laisse moi sur ta bouche
..........Prendre un baiser d'amour
..........Ne rougis pas bergère,
..........Ma mère et moi demain,
..........Nous irons chez ton père
..........Lui demander ta main

Ce baiser sur la bouche d'une femme étendue dans un lit, peut-être encore en corset (voir le 4e couplet), ne plaisait sûrement pas au clergé et heurtait la morale chrétienne. D'autant plus que cette chanson traditionnelle est rapidement devenue une chanson (comptine?) pour les enfants (c'est-à-dire une « petite chanson de caractère léger »!)


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dimanche 7 décembre 2008

Poésie - Chair carnation

Au jardin des vices,
Nous annonçons le rire
Dans nos chairs vives
Baignant dans leur sang.

Sous nos peaux nuits
Couru de mille délices
Se défont nos rêves
Puisés à même les nobles espérances.

Nos yeux sont bleus,
Et rouges au-dessus
Et violets par en dessous,
Tout mêlés.

Dans le silence enserré
Entre nos côtes,
Nulle intonation ne dévoile
Les replis intimes de nos corps offerts.

Pas d’hésitation.
Pas de tremblements.
Pas de frémissements.

Nous annonçons le rire
Mais nos corps ne jouissent plus.

Pierre Rousseau, Sur le dos de la nuit, 2005.

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samedi 6 décembre 2008

Des troubles - Yeux de travers

Dans ses Mémoires, Louis de Rouvroy, duc de Saint-Simon parle du père jésuite Michel Le Tellier (1643-1719):

«Sa physionomie étoit ténébreuse, fausse, terrible; les yeux ardents, méchants, extrêmement de travers: on étoit frappé en le voyant.»

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vendredi 5 décembre 2008

Clin d’œil - Enfilade

«Donc elle pose son fusil contre le mur. Elle se couche, rebrousse sa jupe, écarte les jambes et voilà mon Gagou sur elle.
— Ca ! fait Gondran stupéfait. Il frappe du poing sur la table. Ca, alors, non !
— Tel que je te le dis. D’où j’étais je l’ai bien vu: Gagou s’est couché sur elle, comme à l’exercice.»

Jean Giono, Colline.
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jeudi 4 décembre 2008

Regard sur l’enfance - Le jeu de la bouteille

Henri de Montherlant :

«Qu’est-ce qu’un petit garçon qui n'est pas encore amoureux à dix ans! Fi!»

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mercredi 3 décembre 2008

Histoire de voir - Sous son aile



..................................« En guerre,
l’homme ne devient-il pas
un ange exterminateur,
une espèce de bourreau,
mais gigantesque ? »


Honoré de Balzac, Peau de chagrin.
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mardi 2 décembre 2008

Aux yeux de la mort - IrréméDIABLEment

«Je connais Bépécé depuis très longtemps, mais ne le fréquente que depuis peu. En fait depuis que Vaseline l’a pris en affection. Pas un gros quotient, mais sympathique. Imitateur hors pair des faits et gestes de Vaseline et de quelques autres personnes. Il nous a présenté Nobel Flat qui sortait de prison pour voies de fait simples sur un écrivain connu.

Vaseline me prend par les épaules : «Calme-toi.»

– Le dernier mot que j’écrirai, je l’ai sûrement déjà prononcé haut et court, clamai-je.

– Bonheur ? Chagrin ? Vengeance ? suggère Vaseline.

– Trois points de suspension… pour son enfance secrète, dit Bépécé.

– Et cetera, dit Vaseline. Ce mot qui abrège la liste de tout ce qu’il n’a pas vécu, pas gagné, pas mérité depuis sa naissance.

Je déteste quand ils parlent de moi à la troisième personne.

– L’avant-dernier mot que j’écrirai contiendra le mot «diable» caché en son saint, S-A-I-N-T, saint, affirmai-je.

– Pourquoi ? demande Vaseline.

– Parce que je ne suis pas en état de sainteté. Péché mortel.

– Comme dans irréméDIABLEment ? dit Bépécé.»

Pierre Rousseau, Décès et autres petites morts, 2003.

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lundi 1 décembre 2008

Les yeux de Montréal - 10

Rue Laurier, Montréal

Photo: Pierre Rousseau

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