samedi 19 janvier 2008

Histoire de voir - Brunehaut

II y a Brunehaut, fille d’Athanagild, roi des Wisigoths, qui épouse le roi Sigebert d’Austrasie. Devenue veuve, elle administre le royaume avec toute son énergie de petite fille. Mais elle a une voisine, une autre petite fille appelée Frédégonde, qui est reine de Neustrie, et qui ne recule devant rien pour détenir le pouvoir. La guerre fait rage et ravage leurs États. Brunehaut périra dans les tortures. Galswinthe, sœur de Brunehaut, sera, elle aussi, étranglée sur l’ordre de Frédégonde. Aujourd’hui, Brunehaut n’est plus qu’une bière de Belgique: 330 ml, 6,5 % !

Une légende assure que le nom du village de Bruniquel vient de la reine Brunehaut qui aurait construit le château féodal, dont il reste le donjon. C’est vrai que Bruniquel est une remarquable petite cité fortifiée, aux vieilles rues pittoresques bordées de maisons des XVe et XVIe siècles. C’est vrai aussi que les historiens savent bien récupérer l’histoire. Mais la récupération ne fait pas du neuf. Même en marchant dans les rues ordinaires, Brunehaut avait déjà dans ses yeux la profondeur des donjons. Aujourd’hui, un petit centre verrier assure au village une bonne conscience cristalline.

Ah! la Neustrie! pays des Celtes au front dégarni, lieu d’où sourdent les litanies incantatoires – lorica – et les pénitences publiques. Ils ne plaisantent pas, ces Celtes. Et comment le pourraient-ils dans ce pays – Rouen! - où beaucoup de sang et de fromage anglais coulent comme des boissons capiteuses ? Inondations, pestes, émeutes sanglantes et, quelque part, une petite fille brûlée vive: Jeanne D’Arc...

Et la Seine roule toujours ses cadavres empêtrés!

Pierre Rousseau, extrait de «Elsa-Marie ou le sourire des petites filles», Les saisons littéraires, solstice d’été 1997, numéro 11, Guérin éditeur, Montréal; tiré de Pas trop loin du nombril, inédit.

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